La déesse des petites victoires

Y GRANNEC

Ed. Anne Carrière

2012
544 pages
22.00 €

Gödel et son époque
par Élisabeth Busser

On ne s’attend pas, sous ce titre, à lire un livre sur la vie du célèbre mathématicien Kurt Gödel (1906–1978). « Tricotage de faits objectifs et de probabilités subjectives » comme le dit son auteure Yannick Grannec dont c’est le premier roman, ce récit fait défiler sous nos yeux toute une époque. On se prend à se passionner pour ce récit qui couvre à la fois la Seconde Guerre mondiale, la fuite des cerveaux vers les États-Unis et la vie de toute l’intelligentsia de l’époque à l’Institute for Advanced Study de Princeton. Le tout est raconté avec alacrité par Adèle Gödel, la veuve du mathématicien, à une jeune documentaliste, Anna Roth, et on apprécie la vraisemblance du récit.

Ancienne danseuse de cabaret à Vienne, Adèle, la fameuse « déesse des petites victoires », qui a navigué « toute une vie en terre étrangère », celle des mathématiques, a consacré son existence à protéger Kurt de lui-même et a sans doute permis l’éclosion de son talent mathématique et de son œuvre. Ces faits ressortent très bien de ce roman, écrit d’une plume alerte et truffé d’allusions pleines d’humour aux mathématiques – à commencer par le surprenant graphisme du flamant rose de la couverture – et à leurs acteurs. Ils sont assez vraisemblables et connectés à la réalité pour qu’on y croie et se prenne de sympathie pour les personnages que Yannick Grannec, très documentée, fait vivre dans son récit, pour notre plus grand plaisir.